Au début donc était le sombre, placé là en équilibre. Sur nos craintes, nos peurs. Et nos mots ne peuvent s’y soustraire et nos paroles vont dans le sombre.
Puis
des chemins se dessinent mais ils sont comme d’étranges lieux de cris
et d’enlisement. Dans l’ éternel, insupportable et inadmissible retour
de la nuit, se tracent des rues. Le jour n’y est plus que croyance. La défaite ne fait pas un pli. La
ville dessine ses échecs, la mort viendra parmi les détritus, et nous
en serons tous. Des silhouettes pourtant se hâtent dans la misère
aperçue, en accélèrent le mouvement de décomposition. Que reste-t-il quand l’air essaime les mouches ? la
fin d’un monde qui lance ses derniers cris. Il n’est plus de murs, plus
de parois solides. On ne peut s’adosser qu’au néant assombri de ces
instants à grand peine incurvés.
Résister pourtant, à la
ville-méduse, ne pas se laisser pétrifier, garder assez de langue pour
goûter les saveurs, et pour les dire par des syllabes associées comme les mots contre le ciel qui fuit derrière les nuages. Leur chimie.
Voici
donc un texte qui se creuse pour que le vide prenne place,
physiquement. Alain Freixe a laissé Martin Miguel s’emparer de ses
livres, et le plasticien s’est mis au travail, physiquement, sur
l’objet, le forant, faisant surgir du noir, rognant la couverture dans
son épaisseur. De cette rencontre se dégagent un mouvement, une
perception : le sombre est une spirale qui peut être saisie et
dépassée, par les mots et le geste, l’acte de création.
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